Cellule 2455, couloir de la mort - Cell 2455, Death Row - 1955 - Fred F. Sears

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kiemavel1
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Cellule 2455, couloir de la mort - Cell 2455, Death Row - 1955 - Fred F. Sears

Message par kiemavel1 » 04 nov. 2019, 19:22

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Au pénitencier de Saint Quentin en Californie, le condamné à mort "Whit" Whittier, de la cellule 2455, attend son exécution. Il reçoit la visite du directeur de l'établissement et lui remet son testament par lequel il lègue à une mère célibataire les droits d'auteur de son livre autobiographique qui est un best-seller. Whit observe que, malgré les six années passées dans le couloir de la mort à étudier le droit et à écrire un livre rendant compte de son expérience, il ne comprend toujours pas pourquoi un homme se tourne vers le crime. Après le départ du gardien, Whit se remémore sa vie : son enfance auprès de parents attentionnés puis leur déménagement du Michigan à Los Angeles en raison de la santé fragile de l'enfant, un tournant dans l'existence de cette famille qui tourna ensuite à la tragédie après l'accident de voiture qui laissa la mère paralysée …
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Cell 2455 est l'adaptation du best-seller autobiographique -et premier livre- de celui qui fut l'un des plus célèbres détenu américain : Caryl Chessman. Pour l'apprécier un peu, il ne faut rien connaitre du cas Chessman, ne penser à rien et se laisser porter par l'action menée tambour battant par un Fred F. Sears très en forme de ce point de vue là. En tant que "film sur la jeunesse délinquante" puis "film de gangsters", il est donc assez satisfaisant et il appartient plutôt au dessus du panier du sous genre et est également, parmi les nombreux films criminels tournés par Sears, l'un des meilleurs malgré la faiblesse des moyens identifiable au recours aux stocks shots dans certaines des scènes d'action, car c'est l'un des mieux formellement maitrisé. C'est même un sans fautes en terme de mise en scène alors que Sears avait une certaine tendance, souvent visible et gênante, aux bâclages. Ici le récit file … avec la même vitesse et la même fluidité que les voitures qui fuient la police en faisant se lever la poussière suite aux braquages exécutés - eux aussi- en deux temps trois mouvements.
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On suit donc le parcours criminel de Caryl Chessman (rebaptisé ici "Whit" Whittier) : les premiers larcins pour nourrir la famille, le premier vol important commis à la fin de l'adolescence (un vol de voiture), son entrée dans une bande de jeunes "punks" pour les beaux yeux d'une jeune fille (enfin, les yeux de Kathrin Grant, ce n'est pas ce qui chez elle saute aux yeux en premier) …. et aussi -revers de la médaille - les différents séjours à l'ombre, là aussi allant crescendo : la maison de redressement puis les établissements pénitentiaires de Californie.

S'il s'agissait du parcours criminel d'un personnage imaginaire ou même de la biographie filmée d'une des grandes célébrités du crime américain comme il y en eu de nombreuses sur les écrans durant ces années 50, le film serait satisfaisant si l'on considère son rythme et son efficacité en tant que petit "Actioner". Mais voilà, il s'agit de celle d'un homme qui a beaucoup écrit (4 livres …. mais un seul publié au moment de la réalisation du film), beaucoup témoigné de son expérience (notamment plus tard auprès de l'écrivain et journaliste français Dominique Lapierre) et donc sa personnalité était bien connue, déjà à l'époque. Même en 1955, il y avait moyen de brosser un portrait un tant soi peu fidèle à la complexité du personnage … Or, ce que montrent de lui les scénaristes et réalisateur de ce film est très insuffisant, très partiel, parfois partial, voire douteux.
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Durant la première partie, Sears avait pourtant présenté de manière fidèle au livre les évènements graves qui avaient entrainé Whit vers la délinquance : l'accident de voiture, la paralysie de la mère, l'endettement de la famille suite aux opérations tentées pour la remettre debout, le chômage du père durant les années 30, ses tentatives de suicide … mais pas les problèmes de sante de l'enfant dont une encéphalite dont il disait qu'elle avait changé sa personnalité. Mais ensuite ils ne montrent plus aucune sympathie pour le personnage -sans se montrer non plus vraiment hostile-, évidemment durant toute la partie montrant essentiellement ses méfaits, puis durant les séquences en prison (Whittier se montre narquois, hargneux et cynique avec les gardiens et le "Warden") ni par la suite lorsqu'ils font de son authentique intelligence une illustration simplette et partielle en montrant surtout de lui une grande malice et de la roublardise lorsque - par exemple - tout ce qui est montré de ses actions au cours de son procès (il s'est défendu seul, sans avocat, s'étant appuyé sur la multitude de livres de droit qu'il avait étudié soigneusement tout au long de sa détention), c'est son habilité à dénicher dans les textes de loi les petites erreurs et vices de procédure qui vont entraver la bonne marche du procès de manière abusive sur des détails qui peuvent paraitre insignifiants mais qui légalement lui permettent de gagner du temps. Or, même si c'est bien ainsi qu'il a parfois procédé, il aurait été plus honnête de le montrer surtout lorsqu'il s'est battu et défendu - bec et ongles - aussi sur le fond du dossier (1). Ce faisant, Sears et ses complices font du militant et grand lutteur surtout une petite frappe rusée et procédurière.
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Ceci est toutefois assez discret et les initiateurs du film ne vont pas jusqu'à l'hostilité catégorique : on ne voit pas le visage de celui qui agresse les couples d'amoureux qui s'isolent en voiture sur les hauteurs de la banlieue de L.A. et enlève les jeunes femmes pour les violer, faits pour lesquels Chessman a été condamné à mort (voir note en bas de page) et le fait de le montrer - par ailleurs - séduisant avec les femmes et semblant avoir des relations saines et faciles avec elles plaiderait même plutôt en sa faveur) mais on a plutôt l'impression qu'ils font preuve d'une grande prudence et on pourrait qualifier l'ouvrage, de film "centriste". Que penser d'autre quand tout l'aspect militant et révolté de Chessmann est presque absent. Il ne reste rien ou presque des combats de Chessman qui s'est montré notamment très remonté contre le traitement des adolescents dans les "Reform School" américaine de l'époque ou de son combat contre la peine de mort, au delà de son cas personnel. Rien non plus sur l'aide qu'il apporta à d'autres détenus à travers le pays ( il les aida financièrement grâce à ses droits d'auteur) … Prudence ? Hostilité ? Quoiqu'il en soit, que l'on croit ou non en son histoire, que l'on croit ou non qu'il soit nécessaire de réformer les méthodes employées dans les maisons de redressement et les pénitenciers américains, que l'on respecte ou non ses combats, la quasi absence de cet aspect là de sa personnalité et de son action est une faute. Ce sur quoi le film se montre - en creux - finalement le plus critique, ce n'est pas pour les centres de redressement ou les prisons américaines, c'est envers le système judicaire américain qui permet à des petits malins d'utiliser de toutes petites failles dans les textes juridiques et leur application pour tenter de se disculper ou échapper aux poursuites.
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Pires sont les propos qui reviennent plusieurs fois dans le récit, dont les derniers que Chessman/Whittier exprime sur son expérience, puisqu'il finit par dire que les alibis "victimaires" cherchant à expliquer le passage dans la délinquance par la malchance, la pauvreté ou la dureté de l'existence des plus démunis au sein de la société américaine, sont des "foutaises". Il finit en effet par dire que seul l'individu est responsable de son sort … Or, si Chessman n'était pas un pleurnichard et qu'il était capable de tenir de tels propos, nous laisser la dessus est douteux. Bref (encore une fois il fut difficile de faire bref), ce film laisse une impression contrastée et au final frustrante même s'il est loin d'être le plus raté des films criminels de Sears. J'y reviendrais vite. Un mot sur l'interprétation. Celle des frères Campbell : J. Wright (Chessman/Whittier adolescent) et surtout William (le même devenu adulte) est très bonne. Vu (à peu près ) en vost. Ma note : 55/100
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(1) Ce qui a conduit à l'exécution de Chessman dans un état de Californie où la peine de mort était abolie sauf dans des cas très particuliers ( depuis l'enlèvement du fils Lindberg, les kidnappeurs pouvaient dans certaines conditions être condamnés à mort), ce sont les accusations de viols et d'enlèvements sur 2 femmes. Or, coupable ou non de ces viols (lui même a reconnu ses autres actes mais niait avoir commis ces viols), la façon dont ils s'étaient produits n'auraient pas du entrainer sa condamnation à mort. Cela fut reconnu par la suite mais il y eu pas, dans son cas, de rétroactivité … et pas plus de procès en réhabilitation (partielle)
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chip
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Re: Cellule 2455, couloir de la mort - Cell 2455, Death Row - 1955 - Fred F. Sears

Message par chip » 05 nov. 2019, 08:57

Lu le bouquin de Chessman dans mon adolescence, sa mort fut largement commentée dans les médias... je n'ai jamais vu le film.

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chip
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Re: Cellule 2455, couloir de la mort - Cell 2455, Death Row - 1955 - Fred F. Sears

Message par chip » 05 nov. 2019, 10:39

Alan Alda incarna Chessman dans un excellent TVM ( selon L. Maltin) : " Kill me if you can " ( 1977) réalisé par Buzz Kulik. 2 étoiles pour le Sears dans le Maltin.

kiemavel1
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Re: Cellule 2455, couloir de la mort - Cell 2455, Death Row - 1955 - Fred F. Sears

Message par kiemavel1 » 05 nov. 2019, 14:06

chip a écrit : 05 nov. 2019, 08:57 Lu le bouquin de Chessman dans mon adolescence, sa mort fut largement commentée dans les médias... je n'ai jamais vu le film
Voilà … sa popularité était arrivée jusqu'à nous. Le livre aurait mérité un meilleur traitement. La Columbia a produit ça comme elle aurait produit n'importe quelle biographie criminelle plus ou moins fantaisiste. Si le studio avait pris le sujet au sérieux en ayant conscience de son importance, elle n'aurait pas confié le projet à un producteur de petits westerns comme Wallace MacDonald et la réalisation à Fred F. Sears

chip a écrit : 05 nov. 2019, 10:39 Alan Alda incarna Chessman dans un excellent TVM ( selon L. Maltin) : " Kill me if you can " ( 1977) réalisé par Buzz Kulik. 2 étoiles pour le Sears dans le Maltin.
Pas vu mais je connais la réputation de ce téléfilm qui est parait-il meilleur que le film de Sears. Par contre, il montrerait un Chessman encore beaucoup plus sombre, agressif et violent

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