[06/03/2019] Time and tide (Carlotta Films)

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pak
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[06/03/2019] Time and tide (Carlotta Films)

Message par pak » 03 févr. 2019, 17:10

Quand Tsui Hark réalise Time and tide, il revient de sa tentative américaine.

Car comme beaucoup de ses collègues du cinéma hongkongais, Tsui Hark a quitté l'île de Hong Kong la veille de la rétrocession du territoire à la Chine en 1997. Punaise démocratique dans le derrière du communisme chinois, l'île, gérée par le Royaume-Uni, était une ouverture vers l'Occident tout en gardant sa spécificité asiatique. C'est d'ailleurs grâce à cela que le cinéma hongkongais s'est si facilement exporté (au point d'être une mode en Occident dans les années 1970) contrairement au cinéma national chinois, généralement trop marqué idéologiquement.

L'approche de la rétrocession a donc généré une vague migratoire des talents vers Hollywood, qui n'a pas su quoi en faire, enfin si, les américains ont fait n'importe quoi. Comme injecter du kung-fu dans une adaptation des Trois mousquetaires (D'Artagnan de Peter Hyams en 2000)... Ou assimiler les réalisateurs de Hong Kong au film de baston bourrin. C'est ainsi que John Woo dut se coltiner Jean-Claude Van Damme qui avait alors la cote, pour donner le machin nommé Chasse à l'homme avant de pouvoir accéder à des budgets plus sérieux. C'est ensuite Ringo Lam qui hérita du belge castagneur pour Risque maximum.

Puis ce sera au tour de Tsui Hark de récupérer le bébé champion du grand écart, pour deux films encore plus mauvais, Double Team et Piège à Hong Kong... Le problème, c'est qu'en plus de l'ineptie de ces productions, le produit JCVD était déjà sur la pente déclinante, attirant de moins de moins de monde dans les salles, étant sur le seuil des productions direct to video...

Un échec donc pour Tsui Hark qui va rentrer au bercail, rassuré par la transition politique de Hong Kong (la plupart des récalcitrants va revenir), pour faire ce qu'il aime comme il l'aime, sans producteurs pour lui dicter quoi faire. Son premier film pour son retour sera Time and tide. Et l'auteur va alors se lâcher, se permettant toutes les expérimentations que son budget lui permet, trouve des angles de vue improbables, refuse à sa caméra la moindre pose, complexifie par le montage un récit à la base simple, n'hésite pas à modifier la forme en cours de route, passant d'un filmage quasi documentaire à la folie cinématographique de gunfights chorégraphiés, bref, il est dans une logique de ne surtout pas reproduire ce qu'on attendait de lui sur l'autre continent, voulant démontrer qu'on peut être non conventionnel et laisser libre court à sa créativité et réussir quand même un film (le film aura 6 nominations au Hong Kong Film Award 2000, et la critique occidentale sera quasi positivement unanime).

Du cinéma d'action virtuose, trop peut-être car la narration peut déconcerter. Tsui Hark est un génie de la caméra, bouillonnant d'idées, presque frénétique et hyperactif. Souvent encensé dont plusieurs films ont atteint un statut culte (celui-ci en est). Mais passées la surprise et l'émerveillement de la découverte, on peut aussi lui faire un léger reproche, valable aussi pour ses meilleures œuvres : le caractère bordélique de ses univers filmés, qui peut lasser, ou faire décrocher, comme si parfois l'auteur perdait le fil de son histoire, comme s'il n'arrivait pas totalement à canaliser son trop plein de créativité. Même ses succès récents à gros budgets, la série des Détective Dee, pâtissent de cela, un peu comme quelqu'un qui tournerait trop vite les pages d'un livre qu'on est en train de lire, nous privant des dernières lignes où nous forçant à une concentration excessive qui finit par gâcher une partie du plaisir.

Mais assurément, Time and tide est à (re)voir, et Carlotta va nous le permettre dans des conditions optimales, grâce à son édition Blu-ray et son image restaurée. L'éditeur proposera en mars un combo Blu-ray / DVD dans sa collection Les Éditions Prestige Limitées (huitième titre, limitée à 2000 exemplaires). Dans les bonus apparaitront :

- Le fac-similé du dossier de presse d’époque,
- Un livret exclusif sur le film et le cinéma hongkongais (en fait l'article sur Tsui Hark paru dans la revue Le Cinéphage n°13 parue en 1993 + un article inédit du spécialiste du cinéma hongkongais Arnaud Lanuque),
- Une reproduction de l’affiche du film (40 x 60 mm),
- 16 photos d'exploitation sous forme de cartes postales,
- Le commentaire audio de Tsui Hark en VOst,
- Une intervention de 20 minutes de l'historien du cinéma Charles Tesson qui revient sur l'auteur et son style,
- Une autre de 24 minutes des cinéastes et scénaristes Julien Carbon et Laurent Courtiaud (Les Nuits rouges du bourreau de jade) qui reviennent sur le film et son importance dans la film de Hark,
- Une dernière, dispensable, de 10 minutes d'un créateur de web-série (le rapport avec la choucroute ? ),
- La bande-annonce.



Une édition DVD simple sera disponible en même temps (mais sans les suppléments papier). Pour une édition simple Blu-ray il faudra patienter, Carlotta ne la proposant que plusieurs mois après la sortie de l'Édition Prestige Limitée.


VF et VOst.


De quoi faire oublier l'édition DVD de Sony sortie en 2002.


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Dans la guerre, il y a une chose attractive : c'est le défilé de la victoire. L'emmerdant c'est avant...

Michel Audiard