Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

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kiemavel1
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Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par kiemavel1 » 16 août 2019, 16:28

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Avec un complice, Casey Martin (Frank Lovejoy) vole un camion chargé d'alcool. Ayant relevé ses empreintes sur un paquet de cigarettes trouvé sur place, les flics l'arrêtent très vite. Parce qu'il a déjà été condamné 3 fois par le passé, Casey risque la prison à vie alors les agents du trésor lui proposent un marché pour laver son passé de petit truand : piéger Dutch Becker (Forrest Tucker), patron du crime organisé régnant sur plusieurs états. Après avoir revu sa sœur, ancienne employée de Becker devenue une épave, Casey accepte de devenir l'informateur de la police malgré les risques encourus. A contrecœur, Gladys (Peggie Castle), sa petite amie qui fut également une employée de Becker, lui permet d'établir le contact avec le parrain. Celui ci est vite séduit par le caractère fort et indépendant de Casey malgré la haine que lui voue un ancien compagnon de cellule qui est maintenant le bras droit de Becker, Lou (Timothy Carey) …
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Beaucoup de qualités dans ce film d'un petit spécialiste du genre (Schuster réalisa plusieurs films criminels dans les années 30 et surtout, dans les années 50  : Loophole, Security Risk, Port of Hell et Portland Exposé) mais aussi un défaut selon moi majeur : Frank Lovejoy n'était peut-être pas l'acteur idéal (1) pour incarner un tel personnage nerveux, agressif, caractériel, ultra violent et, concrètement, toujours au bord de l'explosion : Il envoie violemment à terre l'homme saoul qui le bouscule légèrement ; massacre à coup de poings un géant comme Lou, etc ... Cette impression est peut-être moins du à sa stature qui tranche avec celles de Tucker et Carey - car après tout des petits (Dane Clark, John Garfield ...) étaient crédibles dans des rôles similaires - qu'à sa filmographie noire puisque jamais Lovejoy n'avait été dans ce registre là dans ses pourtant nombreux films noirs tournés, tant avant, qu'après celui ci (10 films entre 1950 et 1955, dont au moins 2 grands).
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Cette violence causa d'ailleurs quelques soucis au film puisqu'il fut charcuté pour cette raison et le censeur trouva encore davantage à redire sur certaines des activités illégales de Dutch, lequel est dans le montage final, surtout montré comme un bootlegger et même s'il est aussi suggéré qu'il dirige un vaste réseau de prostitution, c'était bien plus explicite avant coupures (Gladys, qui se dit une ex « employée « était à l'évidence une prostituée de Dutch). Mais de manière encore plus systématique, toute allusion à la drogue a carrément été bannie alors qu'il est évident que Lucille, la sœur de Casey, elle aussi une ancienne « travailleuse » de Dutch, est accro aux stupéfiants (alors qu'il n'est question que d'alcoolisme dans le dialogue et la voix off). Même le personnage interprété par le dingo Timothy Carey a été édulcoré, et pourtant, tel qu'il est, il est déjà bien gratiné !

Mais tout est violent, sombre et triste dans ce vilain petit film noir, à commencer par tous les hommes sans exceptions montrés comme de violents abrutis, y compris Casey, même s'il est cependant capable d'un peu s'humaniser au contact de Gladys. Et ce sont les femmes qui dégustent : elles sont exploitées, violentées, détruites ... Celles que l'on ne voit que passer sont soient des victimes du moment (une jeune femme qui s'était enfuie en piquant dans la caisse d'une des boites de Dutch est massacrée par Lou avant d'être probablement tuée) ; de futures victimes (la jeune femme au regard perdue qui est introduite dans le bureau de Dutch pour entrer à son service, qui est acceptée et s'en trouve flattée) ou bien d'ex victimes : Lucille, toxicomane et suicidaire, ou bien Gladys, beauté légèrement fanée qui a toutefois échappé à Becker et qui rêve encore de nouveau départ … Mais les nouvelles activités risquées de son compagnon condamnent cet espoir … Et évidemment, elle est même une victime toute désignée. Une des plus belles scènes nous montre Casey observer de la fenêtre de leur appartement Gladys partir seule dans la nuit … Ce sera la dernière fois qu'il la verra vivante ! Que l'on connaisse ou non son triste destin, on peut trouver la performance de Peggie Castle déchirante.
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Car si dans un premier temps, Dutch Becker avait d'abord été intrigué et séduit par l'indépendance de Casey – et accessoirement ses compétences utiles à son trafic d'alcool – il s'en méfie rapidement, malgré les apparences et ses sourires de facade, et charge son bras droit d’exécuter les sales besognes. Le massif Forrest Tucker, dont les moyens d'acteur étaient assez limités mais dont la présence était forte, n'avait pas besoin d'en faire beaucoup dans ce rôle de parrain et il est parfait, aussi placide en apparence (il blâme Casey pour sa violence) que profondément mauvais et il est aussi bien servi par quelques « bonnes lignes ».

Son bras droit, c'est à peu près le même mais resté à l'état primitif. Il se reconnaît d'ailleurs dans son patron - et plus si affinités (il hait tellement les femmes qu'on peut se demander) puisqu'il affirme n'aimer personne en dehors de Dutch Becker. Comme souvent, Carey vole toutes les scènes dans lesquels il apparaît. Même quand il n'est pas au centre de l'attention, il faut le voir dans un coin, rouler des yeux ou grimacer. C'est une sorte de primate mis dans un large costume noir et portant chapeau. Avec sa sale trogne, ses postures raides et ses bras ballants, il peut faire aussi penser à un zombie dont d' énormes paluches prêtes à cogner sortiraient des manches. Il en fait vraiment beaucoup ici mais sa présence unique et inquiétante vaut à elle seule le visionnage même si avec Carey on a affaire à un second role limite qui amène les films dans lesquels ils apparait vers l'abstrait car à coté de lui, même de massifs et très bons salopards comme Raymond Burr pourraient paraitre ternes alors qu'ils sont peut-être aussi plus vraisemblables ... ou acceptables car aussi sombres soient ils, encore un peu humains.
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Un petit mot sur la musique qui a son importance puisque Casey est aussi un pianiste de bar (il joue deux ou trois fois). Parait que la musique adoucie les mœurs. Euh .. ça ne marche pas toujours. Par ailleurs, la musique du film – dont le thème principal pourrait passer pour un archétype de la musique du genre - est une très belle réussite signée de l'excellent Paul Dunlap. Quant au scénario, il est du à Warren Douglas qui travailla plusieurs fois pour le metteur en scène : Les 2 Jack Slade, Dangereuse enquête (Loophole), La poursuite fantastique (Dragoon Wells Massacre). Pour finir, dans Portland Exposé (1957) qui sera son dernier film noir, Schuster reprenait des éléments de Finger Man : l'infiltration d'une organisation criminelle. L'écoute de confidences compromettantes avec un système d'enregistrement dissimulé. Le policier moribond jeté sous un véhicule en marche… Vu (à peu près) en vost

(1) C'est d'ailleurs Broderick Crawford qui devrait interpréter le personnage mais il tomba malade
Modifié en dernier par kiemavel1 le 18 août 2019, 10:58, modifié 1 fois.

kiemavel1
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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par kiemavel1 » 16 août 2019, 17:11

Les filles, il y a avant et après avoir croisé Timothy Carey :

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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par kiemavel1 » 16 août 2019, 17:12

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chip
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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par chip » 16 août 2019, 18:41

Schuster aurait dû prendre Mark Stevens pour le côté "nerveux, tendu, agressif, caractériel " :lol: ou alors Dane Clark, Garfield étant mort depuis plus de deux ans, mais Schuster n'avait sans doute pas envie de retravailler avec Stevens après " Jack Slade " à moins que ce soit le contraire ( Stevens étant co-réalisateur non crédité du film, selon William K. Everson et Brian Garfield) . Question scénario, c'est Warren Douglas ( pas Williams).
Encore une critique qui nous fait désirer un bon DVD. Bravo .

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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par kiemavel1 » 16 août 2019, 22:32

:D J'ai toujours autant de mal avec les noms propres. Là j'ai fait un mix avec Warren William, acteur dont j'ai découvert pas mal de films ces derniers temps (notamment des " Lone Wolf ").

En ce qui concerne Schuster, je ne sais pas mais Warren Douglas devait manifestement s'entendre avec Mark Stevens puisque - comme tu sais - il écrivit les scénars de 3 films : Le sillage de la mort (1952), Jack Slade le damné (1953) avant d'écrire celui de La vengeance de Scarface, la première réalisation de MS et on peut penser que c'est à sa demande que Douglas en écrivit le scénario. On peut au moins le supposer. Très bon d'ailleurs, ce petit film noir … On en le dira jamais assez :wink:

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chip
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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par chip » 17 août 2019, 08:58

Warren Douglas (1911-1997 ) a aussi été co-scénariste sous son vrai nom Warren D. Wandberg, de " Yellow fin "(1951) et " Sierra passage " ( traqué dans la sierra), un petit western que j'aime bien, Lola Albright doit en être la raison :) . Douglas a écrit 5 films pour Harold D.Schuster, et son travail fut conséquent dans de nombreuses séries TV. Quant à "Cry vengeance "( la vengeance de Scarface) le dvd zone 2 n'est toujours pas un projet....

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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par kiemavel1 » 17 août 2019, 12:17

Oui, concernant la collaboration Harold Schuster / Warren Douglas, 5 films et que des films vraiment intéressants et suffisamment originaux et personnels pour retenir l'attention.

Quant à Frank McDonald, et ben j'ai vu 1 western de lui :oops: : Duel au Colorado avec Audie ... mais j'ai noté des choses à trouver, celui avec Lola Albright, yes, et un autre, Thunder Pass, avec Dane Clark sur lequel je reviendrais rapidement mais pour ses films noirs. Et aussi quelques films criminels, dont : Gambler's Choice avec Chester Morris.
A ce jour, j'en connais 2 : The Purple Gang avec Barry Sullivan et The Big Tip Off avec Richard Conte. Pas mal. Il faudra les présenter un de ces jours … Sinon, j'ai aussi noté un film d'action/drame/mélo ayant du potentiel car se déroulant durant la grande dépression avec en toile de fond la construction du barrage Hoover : Le grand barrage

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chip
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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par chip » 17 août 2019, 13:16

Intéressants les 5 films de la collaboration Harold Schuster/ Warren Douglas ? certes oui pour " Jack Slade " , "the return of Jack Slade " et " Dragoon wells massacre", les autres je ne les ai jamais vus. Bien ignoré chez nous Harold Schuster, à tort ?

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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par kiemavel1 » 17 août 2019, 13:22

Tu ne connais pas : Dangereuse enquête (Loophole) avec Barry Sullivan, Dorothy Malone et Charles McGraw ?

C'est le moins original … mais c'est l'un des plus réussis sur un scénario solide et classique de film noir avec un bel affrontement Sullivan / McGraw

Stark
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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par Stark » 18 août 2019, 01:09

Finger Man, je dis bravo de chroniquer ce "maverick" de qualité B du polar, du Schuster combiné avec du Warren Douglas, absent des encyclopédies du film noir.
En parlant de Warren Douglas, j'apprécie beaucoup "The cruel tower" réalisé par Lew Landers en 1956, je n'ai jamais vu un Charles Mac Graw aussi virulent (bon, le film a aussi ses défauts). Avec Mari Blanchard, John Ericson, Steve Brodie.

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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par kiemavel1 » 18 août 2019, 10:35

Stark a écrit : 18 août 2019, 01:09 Finger Man, je dis bravo de chroniquer ce "maverick" de qualité B du polar, du Schuster combiné avec du Warren Douglas, absent des encyclopédies du film noir.
En parlant de Warren Douglas, j'apprécie beaucoup "The cruel tower" réalisé par Lew Landers en 1956, je n'ai jamais vu un Charles Mac Graw aussi virulent (bon, le film a aussi ses défauts). Avec Mari Blanchard, John Ericson, Steve Brodie.
Oui, le solide Charles McGraw était bien rugueux là dedans mais il était plus manipulateur et retors que vraiment "virulent' ; dans mon souvenir en tous cas. Il était peut-être plus ouvertement flippant dans : The Threat l'un des bons films de Felix E. Feist et, à un degré moindre, dans un film évoqué plus haut : Dangereuse enquête / Loophole, dans lequel il harcelait Barry Sullivan. Pas de DVD mais ces 2 films ont été montré à la TV chez nous. Cela dit, McGraw devait être plus "subtilement mauvais" et en tant qu'acteur, plus fin, dans le Landers. Si c'est ce que tu voulais dire, oui.

A vrai dire, je ne me souviens pas très bien du film. Juste que j'avais aimé avec modération. Lew Landers, c'est un metteur en scène dont j'ai vu pas mal de films mais il y en a quand même très peu de vraiment réussi. Il faut vraiment avoir des besoins de complétistes pour se fader certains de ces films. Mais pour Mark Stevens, j'ai voulu voir Le sillage de la mort et il y en a quelques autres comme ça avec d'autres acteurs/trices qui m'intéressent.

Pour revenir aux "noirs", on peut voir de lui un "épisode" du Whisler (le siffleur) et un Boston Blackie, et sinon, on peut signaler Inner Sanctum, petit film ultra fauché mais si bizarre qu'il en est intéressant (Il est visible dans des copies médiocres mais en vost)

J'ai quand même bien aimé aussi : J'ai vécu deux fois / Man in the Dark, plus maitrisé que nombre de ses réalisations. Parfois drôle sans le vouloir, m'enfin c'est quand même son dessus du panier. Et puis : Edmond O'Brien, Audrey Totter, Ted de Corsia et même Nick "Va Va Voum" Dennis, excusez du peu ! Celui là est sorti en Blu-Ray aux USA (avec sous titres anglais) et en version 3D ::)

J'en ai essayé d'autres, dont un film, de "pénitencier" : Chain Gang mais suis pas allé au bout :wink:

Stark
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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par Stark » 19 août 2019, 12:34

Je connais ces films de Lew Landers qui sont d'honorables séries B. De Landers, je rajoute une excellente série B, I was a prisonner on devil's island (1941) avec un excellent Eduardo Cianelli dans le rôle du Doctor Satan.

Timothy Carey, on le voit complètement allumé dans Revolt in the big house de RG Springsteen, avec Gene Evans et Robert Blake, bon film de prison.

Concernant Warren Douglas, il a également écrit deux autres films noirs, The strange intruder (d'Irving Rapper) et The come-on (de Russell Birdwell). Finger man est photographié par William Sickner qui a éclairé deux autres films écrits par Warren Douglas, Loophole et Cry Vengeance.

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chip
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Re: Finger Man - 1955 - Harold D. Schuster

Message par chip » 19 août 2019, 13:05

William Sickner est aussi l'opérateur de " Jack Slade " et " Torpedo alley " 2 films Allied Artists de 1953 avec Mark Stevens :wink: .Dans son livre " Encyclopédie du film noir, vol. 1 U.S.A. 1912- 1960 " Patrick Brion cite Norris Lipsius et John Lardner comme scénaristes de FINGER MAN, ce sont les auteurs de l'histoire, scénarisée par WARREN DOUGLAS.

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